J’ai entendu parler de ce dernier roman de Philippe Besson dans une émission de radio en voiture, et j’avais très très très envie de le lire tant le sujet dont il traitait me plaisait et me parlait… Paru le 7 janvier 2021 aux Editions Julliard.
“Elle le détaille tandis qu’il va prendre sa place : les cheveux en broussaille, le visage encore ensommeillé, il porte juste un caleçon et un tee-shirt infirme, marche pieds nus sur le carrelage. Pas à son avantage et pourtant d’une beauté qui continue de l’époustoufler, de la gonfler d’orgueil. Et aussitôt, elle songe, alors qu’elle s’était juré de se l’interdire, qu’elle s’était répété non il ne faut pas y songer, surtout pas, oui voici qu’elle songe, au risque de la souffrance, au risque de ne pas pouvoir réprimer un sanglot : c’est la dernière fois que mon fils apparait ainsi, c’est le dernier matin.”
Un roman tout en nuances, sobre et déchirant, sur le vacillement d’une mère le jour où son dernier enfant quitte la maison. Au fil des heures, chaque petite chose du quotidien se transforme en vertige face à l’horizon inconnu qui s’ouvre devant elle.
Tout en finesse et en justesse, Philippe Besson raconte la douleur qui submerge Anne-Marie lors du départ de la maison de son dernier enfant.
Tout ce roman se joue sur une unique journée, le jour du départ de Théo, le petit dernier de la fratrie qui quitte le nid, qui déménage dans un petit studio de 22m2 .
Ses parents l’aident à y déménager et à y emménager.
Pendant cette journée si particulière, les souvenirs affluent et l’angoisse de la séparation monte crescendo ….
Anne-Marie ne trouve alors plus de sens à sa vie, elle qui a tout donné pour ses trois enfants se sent à présent seule et vide , malgré la présence de son époux Patrick, époux solide sur lequel elle a toujours pu compter.
J’ai trouvé ce roman si fort, si juste, si poignant, que je n’ai pas pu me stopper dans ma lecture…
Cela a forcément fait écho à ma vie, à ma maman, à mes parents lorsqu’à mon tour à 18 ans j’ai moi aussi quitté la maison familiale pour m’installer dans un tout petit studio Strasbourgeois de 19 m2, les laissant à présent seule avec ma petite soeur… Je ne pensais pas que cela ferait écho en moi dans ce sens là, je pensais plus en commençant ma lecture à mes propres enfants qui quitteront un jour prochain la maison pour partir étudier ailleurs….
“Les mères n’oublient jamais quand elles ont cru, un jour perdre leur enfant.
Elles ne se débarrassent jamais de la frayeur non plus.
Elles vivent chaque jour en redoutant qu’un autre accident survienne.”
“Quand la voiture déboîte et commence à rouler, il lève soudainement la main dans sa direction. Pour dire au revoir. Il ne l’a pas prémédité, il le jure, de fait il obéi à un élan, irrépressible, il en est le premier étonné, au point qu’il envisage un court instant de se reprendre , de se corriger, mais finalement il demeure la main levée, l’agitant mollement, il ne se souvient pas d’avoir jamais fait ça auparavant ; parfois la tendresse est un mouvement qui nous échappe. Et parfois il faut se détacher de ses parents pour s’apercevoir à quel point on tient à eux, même si on le nierait, y compris sous la torture.”
En lisant ces quelques lignes, c’est un gros retour en arrière que je vivais, et je me suis revue exactement à la place de Théo, sur mon trottoir devant mon nouveau chez moi agiter ma petit main envers mes parents qui me laissaient à ma première nuit toute seule…. et c’est avec la gorge très nouée que je m’en suis souvenue…. J’avais envie de leur courir après en leur criant, en fait je rentre avec vous, quelle idée j’ai eu de vouloir habiter toute seule loin de vous…. alors le sentiment de Théo je le comprends… et je l’ai vécue aussi…
Je ne peux que vous conseiller ce livre très très touchant …